Le jeu vidéo est un puits sans fond de mondes ouverts, de quêtes secondaires à n’en plus finir et d’arbres de compétences nécessitant un doctorat en ingénierie. Mais parfois, il faut admettre que l’on aspire à la simplicité brute, à l’élégance du chaos organisé. On veut juste prendre un pad, choisir le grand gaillard musclé et tabasser tout ce qui bouge. Nous cherchons la dose de dopamine immédiate que seuls les jeux d’arcade des années 90, capables de vous vider les poches en cinq minutes, pouvaient offrir. C’est dans cette brèche nostalgique et impitoyable que Dotemu, l’artisan du retour de flamme, vient s’engouffrer avec la plus cosmique des licences : Marvel Cosmic Invasion.
Vous avez probablement les articulations qui couinent au réveil et une sciatique chronique, et vous êtes en quête d’une madeleine de Proust vidéoludique. Celle qui vous renverra à l’âge d’or du canapé et des parties endiablées où la répartition des kits de soin était la cause de nos premiers drames familiaux.
Ce titre est disponible sur PlayStation 5, Xbox Series X|S, Nintendo Switch, et PC via Steam. Pour les nomades et les adeptes du rétrogaming au lit, sachez que cet avis a été rédigé après de longues heures de test sur STEAM et plus spécifiquement sur le Steam Deck. Nous pouvons le confirmer : le jeu tourne parfaitement bien, offrant une expérience fluide et un régal portable qui n’a rien à envier à la version console.
Cet avis a été rédigé grâce à un code envoyé par l’éditeur, que nous remercions pour cette permission de tout casser.

📚 Un Héritage Sacré : L’Histoire du Jeu et ses Inspirations
Le studio Dotemu ne crée pas des jeux ; il exhume et perfectionne des genres. Marvel Cosmic Invasion ne naît pas dans le vide, il s’inscrit dans un héritage sacré du Beat’em All qui sent bon la borne d’arcade et les manettes à six boutons. Ce titre se positionne comme le digne successeur spirituel non seulement de l’excellent TMNT: Shredder’s Revenge, mais aussi des classiques Marvel qui ont jalonné les années 90 et 2000, à commencer par les illustres X-Men ou The Avengers en arcade, et les plus récents X-Men Legends et Marvel Ultimate Alliance en hack and slash.
Il y a donc une double histoire à l’œuvre : celle du studio, qui consolide son statut d’orfèvre en pixel art après des réussites comme Streets of Rage 4, et celle de la licence Marvel elle-même, qui retrouve ici la frénésie du défilement horizontal. C’est l’alchimie de ces deux héritages qui rend l’attente excitante. Dotemu ne fait pas du fan service ; ils sont les gardiens du patrimoine du scroll horizontal. Toucher à Marvel, c’est marcher sur des œufs, mais ils ont prouvé qu’ils étaient les seuls dignes de cette responsabilité. L’alchimie réside dans leur capacité à injecter des mécaniques modernes (comme le Tag-Team) sans trahir l’ADN binaire et instantané du genre.
Ce lancement, coïncidant étrangement avec l’ouverture des calendriers de l’Avent, est un cadeau pour le mois de décembre. D’ailleurs, pour ceux qui hésitent encore, l’inclusion du jeu dans le Game Pass Ultimate est un argument de poids qui rend l’accès au panthéon du tabassage cosmique instantané.


💥 Le Scénario : Annihilus, l’Antagoniste le Plus Prétexte du Cosmos
Il faut saluer l’effort : ce beat’em up dispose d’une trame narrative pour justifier la castagne. Une trame qui, soyons honnêtes, sert avant tout de véhicule pour nos poings. L’antagoniste est Annihilus, dont le nom sonne déjà comme une raison suffisante pour lui botter les fesses. Honnêtement, si mon boss s’appelait Annihilus, j’aurais plus de mal à me lever le matin. Annihilus n’est pas un antagoniste complexe, c’est un concept : la raison de notre fureur. Il est le mur de briques que le scénario nous ordonne de démolir.
Le grand méchant débarque de la Zone Négative, non pas pour une vente de charité, mais pour semer le chaos. Notre tâche est limpide : traverser la galaxie, de New York aux confins cosmiques, afin d’interrompre ses sombres projets. Cette quête épique est le parfait échafaudage narratif qui permet de mettre en scène un défilé d’ennemis cultes comme Thanos, Knull et l’imposant Galactus. Le ton est respectueux du lore, tout en conservant une légèreté bienvenue, indispensable pour ce type d’exercice musclé. Les petites cinématiques sont là pour nous rappeler qui on doit frapper et pourquoi (souvent juste parce qu’ils sont là), de New York jusqu’à la Zone Négative, un décor parfait pour justifier toutes les folies visuelles.

🦸♂️ Le Roster : Entre Icônes, Pépites et Laboratoire de Puissance
L’une des plus grandes réussites de Marvel Cosmic Invasion est la richesse et la diversité de son casting, totalisant 15 personnages jouables. Si les incontournables comme Wolverine, Spider-Man ou Iron Man sont là pour rassurer le grand public (et pour satisfaire mon obsession pour Logan), Dotemu a osé plonger dans les profondeurs du lore Marvel. On y trouve des pépites moins connues comme Phyla-Vell ou le charismatique Beta Ray Bill, qui, loin d’être bêta, s’impose comme le remplaçant de Thor que personne n’attendait, mais dont tout le monde avait besoin.
Le processus de déblocage est un clin d’œil aux jeux de l’époque : certains personnages comme Venom ou Silver Surfer devront être affrontés au cours de l’histoire principale avant de finalement se joindre à vos rangs. Cette technique simple mais terriblement efficace donne une valeur ajoutée à chaque rencontre. Le casting est un laboratoire où l’on teste l’effet de nos griffes, toiles et marteaux cosmiques sur la chair des sbires.
On observe une hétérogénéité fascinante dans les archétypes de jeu, ce qui est crucial :
- Les Choppeurs Lents (Tanks) : (Wolverine, She-Hulk) – Parfaits pour ceux qui aiment les dégâts bruts et les prises de catch. She-Hulk en particulier est une choppeuse implacable dont la puissance brute est un délice.
- Les Voleurs/Tireurs Aériens (Contrôleurs) : (Nova, Iron Man, Storm) – Pour les joueurs qui privilégient le contrôle de l’espace et les combos aériens. Storm est excellente pour dégager l’écran.
- Les Hybrides Farfelus (Dégâts Mixtes) : (Cosmic Ghost Rider, le Surfer Argenté) – Pour ceux qui veulent des mouvements imprévisibles et des attaques à la fois au corps-à-corps et à distance. Le Surfer Argenté qui se bat au corps-à-corps est une hérésie narrative, mais un régal ludique.


👯♀️ Le Système Tag-Team : L’Innovation Salvatrice qui Vaut le Détour
Si certains beat’em up souffrent d’une homogénéité de moveset entre les personnages, ici, la différence est palpable, et elle est magnifiée par le système de Tag-Team. Contrairement aux monologues musclés du passé, Marvel Cosmic Invasion vous invite à la chorégraphie martiale en duo. On choisit deux combattants, bascule instantanément de l’un à l’autre, et on peut déclencher des frappes combinées lors du changement.
Ce mécanisme est la Cerise Cosmique de l’expérience : il transforme la répétitivité du genre en un ballet destructeur sophistiqué. Ce n’est pas une simple roue de secours, mais un layer tactique qui force à penser aux enchaînements. Vous pouvez entamer un combo avec un personnage de zone (Storm) et le finir avec un personnage de dégâts ciblés (Wolverine). C’est ce qui distingue ce jeu de la simple pression répétée sur un bouton. Ce système récompense la maîtrise du timing et permet des ultimes en duo absolument grandioses, qui inondent l’écran d’effets visuels. Attention toutefois : si l’un des deux tombe, il ne reviendra pas. Un stress supplémentaire, mais nécessaire, pour éviter de jouer n’importe comment.

📺 L’Ode à l’Écran Cathodique : Pixels, Nouveaux Fonds de Carte et Maîtrise Visuelle
Visuellement, Marvel Cosmic Invasion est une claque. Le pixel art de haute définition est au rendez-vous, avec des animations détaillées pour les personnages et des arrières-plans vivants qui font voyager dans des lieux inédits de l’univers Marvel.
Le pixel art est si détaillé qu’il en devient presque arrogant. Chaque sprite de personnage est une merveille d’artisanat, bénéficiant d’un nombre de frames d’animation sidérant, garantissant une fluidité de mouvement que nos héros des années 90 n’auraient jamais osée rêver. Nos personnages bougent mieux que moi un lundi matin. Chaque coup, chaque parade, chaque idle stance (la posture au repos) a été choyée, conférant à chaque héros une véritable personnalité visuelle.
Concernant les décors, l’arrière-plan n’est pas un simple papier peint. Il exploite un système de parallaxe multi-couches vertigineux, où les étoiles, les cités lointaines et les débris cosmiques glissent à des vitesses différentes, créant une impression de profondeur et de vitesse grisante. On se croirait à l’intérieur d’un gigantesque diorama numérique.
Chaque explosion, chaque coup critique est une symphonie de couleurs primaires qui dégage une énergie cinétique palpable. Les effets visuels (VFX) des super-pouvoirs, notamment le feu cosmique de Ghost Rider ou les éclairs de Storm, sont à la fois fidèles au style pixel et terriblement modernes dans leur impact. C’est le mariage parfait entre la nostalgie esthétique et la puissance de calcul actuelle.
L’équipe de développement a eu l’excellente idée d’inclure des options visuelles pour les nostalgiques, notamment un filtre CRT particulièrement réussi qui simule le rendu sur les vieux écrans cathodiques. Ce filtre ne se contente pas d’ajouter de simples lignes ; il simule l’effet de color bleed (bavure des couleurs) et le rendu bombé des tubes cathodiques. C’est l’équivalent numérique de cette odeur de plastique chaud et de poussière qui émanait des bornes d’arcade. L’option du filtre CRT n’est pas un gadget ; c’est un acte de foi envers le passé. Le plus appréciable, c’est l’exploitation du lore Marvel au-delà des films du grand public. On visite des recoins peu explorés de l’univers, une véritable aubaine pour les fans les plus assidus.


🎶 Durée de Vie et Bande-Son : Le Rythme et la Répétition Maîtrisée
Abordons deux aspects souvent négligés : le son et la longévité de Marvel Cosmic Invasion
Côté bande-son, l’ambiance est efficace et remplit brillamment son rôle de catalyseur d’adrénaline. On est dans un registre de fusion Rock/Synthwave cosmique, qui réussit à évoquer les thèmes épiques de l’espace tout en gardant cette touche de Heavy Metal obligatoire pour un bon tabassage. Elle ne possède certes pas l’impact monumental et instantané des compositions chiptune électro-funk de Streets of Rage 4. Elle est là pour marteler le rythme de la B.A.G.A.R.R.E., et évoque même de subtils frissons de plaisir chez les fans de Marvel vs Capcom à travers certaines mélodies et l’échantillonnage des voix. L’OST est « compétente » : elle soutient l’action sans jamais la voler, mais on aurait aimé un ou deux thèmes de boss qui restent durablement dans la mémoire après l’extinction de la console. Le véritable triomphe sonore réside cependant dans les effets d’impact : chaque coup de griffe, chaque projection, chaque special move bénéficie d’une pêche qui renforce le feedback et le plaisir immédiat.
Quant à la durée de vie, la campagne se boucle en 3 à 4 heures chrono en difficulté normale, une durée non pas courte, mais typique et parfaitement calibrée pour le jeu d’arcade. La durée de vie n’est pas une faiblesse, c’est une caractéristique du genre. On ne finit pas un beat’em up, on le maîtrise. Le véritable défi est dans la rejouabilité, encouragée par le mode Arcade, les scores à battre au classement en ligne, et la chasse aux défis pour débloquer les ultimes compétences. Ce level-up constant est ce qui justifie les inévitables sessions de grinding post-générique ; on revient pour chercher le niveau max de Beta Ray Bill, comme une obsession saine. Côté multijoueur, le jeu est limité à quatre participants en ligne ou en local, ce qui est la juste mesure pour conserver une lisibilité de l’action et plus de stratégie, contrairement au joyeux chaos de six joueurs. Moins de potes, mais plus de pizza, et surtout, moins de chaos ingérable à l’écran, ce qui permet de mieux exécuter les combos Tag-Team.

⭐️ Verdict Final : Le plaisir n’a pas d’âge
Points Positifs ✅
- Maîtrise Dotemu du genre Beat’em All et du pixel art.
- Système de Duo/Tag-Team qui renouvelle la formule tactique et évite la monotonie.
- Direction Artistique Pixel Art impeccable avec des animations somptueuses.
- Roster très varié, intelligent et respectueux du deep lore Marvel (Beta Ray Bill, She-Hulk, etc.).
- Performance parfaite et jouabilité idéale sur Steam Deck.
- Filtre CRT qui est un véritable acte de foi envers l’esthétique rétro.
Points Négatifs ❌
- Campagne Principale relativement courte (3-4h), typique du genre arcade, mais qui peut décevoir.
- Répétitivité inhérente au genre, qui demande une adhésion totale à la formule.
- Multijoueur limité à quatre joueurs (certains auraient aimé plus de chaos).
- Bande-son « compétente » mais sans thèmes aussi iconiques que Streets of Rage 4.
Marvel Cosmic Invasion n’est pas là pour réinventer la poudre, mais pour prouver qu’une formule ancienne peut être sublimée par un savoir-faire contemporain. Si vous cherchez un défouloir immédiat, gorgé de fan service et techniquement impeccable, vous êtes au bon endroit. Ce titre est un plaisir cosmique qui fait mouche et mérite sa place aux côtés des plus grands classiques du genre.
Un nouveau classique du Beat’em All à posséder absolument pour les nuits en co-op.
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